Résolu et offensif. Emmanuel Macron assure ne pas avoir fait « fausse route ». Mais il a promis une « nouvelle méthode » pour « lever beaucoup de malentendus », multipliant les annonces fiscales, sociales et institutionnelles jeudi 25 avril 2019 lors d’une grande conférence de presse à l’Élysée.
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Lors de cet exercice inédit depuis son élection en 2017, devant quelque 320 journalistes, le chef de l’Etat a salué les « justes revendications à l’origine » du « mouvement inédit » des « gilets jaunes » qui a profondément bouleversé le quinquennat depuis le 17 novembre.
« Dur et parfois injuste »
Souvent critiqué pour des phrases choc, le président a dit regretter d’avoir donné « le sentiment » d’être « dur », « parfois injuste ». « Ça n’a pas aidé à la cause », a-t-il admis.
Macron confie qu'il "regrette" d'avoir donné "le sentiment d'être dur et parfois injuste"https://t.co/Hal1D2rVKp pic.twitter.com/u5AiFVeOVY
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Pour « répondre à la juste part d’énervement » et « lever beaucoup de malentendus », il a promis « une nouvelle méthode », une « nouvelle manière » de gouverner, avec un leitmotiv: « l’humain remis au cœur du projet ».
Mais face à ce « profond sentiment d’injustice fiscale, sociale et territoriale » et de manque de considération de beaucoup de nos concitoyens« , »est-ce qu’il faudrait arrêter tout ce qui a été fait depuis deux ans ? (…) Est-ce qu’on a fait fausse route ? Je crois tout le contraire », a néanmoins soutenu le président.
« Je me fiche de la prochaine élection »
Et M. Macron l’a assuré : « je me fiche de la prochaine élection » présidentielle.
"Je me fiche de la prochaine élection" présidentielle assure Emmanuel Macron qui dit "vouloir réussir ce mandat" pic.twitter.com/rnNfyB6cte
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Parmi les mesures ayant fuité de son intervention non diffusée du 15 avril en raison de l’incendie de Notre-Dame, le chef de l’Etat a confirmé vouloir réduire « significativement » l’impôt sur le revenu, évoquant le chiffre de « 5 milliards » d’euros et un financement par la suppression de « certaines niches fiscales » et avec « la nécessité de travailler davantage ».
"Si on arrive à baisser de cinq milliards d'euros l’impôt sur le revenu, ce sera un geste significatif", précise Emmanuel Macron pic.twitter.com/PbQ7NiHlm8
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Objectif de 120 000 fonctionnaires ?
Mais sur ce point, M. Macron a donné quelques arbitrages au sujet de pistes évoquées au sein de sa majorité, en estimant que travailler plus ne pouvait pas passer par la suppression d’un jour férié ou un recul de l’âge légal de départ à la retraite. Il a par contre relevé que l’on pouvait « laisser le libre choix » en ce qui concerne l’allongement de la durée de cotisation.
Autre confirmation : la réindexation des pensions de retraites de moins de 2000 euros sur l’inflation. Avec deux nouveautés: la fin de la « sous-indexation » de toutes les retraites en 2021, et la volonté d’une retraite minimale de 1000 euros pour tous ceux qui ont une carrière complète.
Promesse incluse dans le discours avorté du 15 avril, le chef de l’État a dit ne plus vouloir de fermetures « ni d’hôpitaux ni d’écoles » d’ici 2022.
Il s’est par ailleurs dit prêt à « abandonner » l’objectif de 120 000 fonctionnaires qu’il avait fixé « si ce n’est pas tenable ».
Au plan éducatif, il a notamment souhaité des classes de 24 élèves maximum de la grande section de maternelle au CE1.
S’exprimant longuement sur les questions institutionnelles, le chef de l’État a confirmé vouloir instaurer une dose de 20% de proportionnelle à l’Assemblée et une suppression de 25% à 30% du nombre de parlementaires, dans le cadre d’une révision constitutionnelle qu’il souhaite voir examinée au Parlement « à l’été ».
Il a en revanche rejeté l’instauration du vote blanc et du vote obligatoire.

Emmanuel Macron le 25 avril 2019 à L’Elysée. (©AFP/ludovic MARIN)
Décentralisation
M. Macron souhaite également réformer le référendum d’initiative partagée instauré en 2008 en abaissant le seuil de déclenchement à 1 million de signatures citoyennes. Quant au référendum d’initiative citoyenne (RIC), revendication récurrente des « gilets jaunes », il souhaite l’instaurer, mais seulement au niveau local.
Il a confirmé sa volonté de réformer le Conseil économique, social et environnemental (Cese), qui intègrera « dès le mois de juin » 150 citoyens tirés au sort, qui plancheront en tout premier lieu sur les questions climatiques.
M. Macron a également annoncé « un nouvel acte de décentralisation » pour début 2020 et « une profonde réorganisation de l’administration » que le Premier ministre Édouard Philippe présentera au mois de mai.
Ministres réunis
Il a confirmé son intention de supprimer l’ENA et expliqué vouloir mettre fin aux « grand corps » de la fonction publique.
Alors qu’ONG, opposition mais aussi aile écologiste de la majorité se sont inquiétées ces derniers jours de la faiblesse des annonces en matière d’environnement, M. Macron a expliqué vouloir mettre en place un « Conseil de défense écologique ».
Il présidera cette instance qui réunira le Premier ministre et les ministres concernés et devra « prendre les choix stratégiques et mettre au cœur de toutes nos politiques cette urgence climatique ».
Le président a également promis d’être « intraitable » face à « l’islam politique qui veut faire sécession avec notre République ».
Pour initier la mise en œuvre de ces chantiers, Édouard Philippe réunira lundi en « séminaire » ministres et responsables de la majorité.

Emmanuel Macron lors de sa conférence de presse à l’Elysée, le 25 avril 2019. (©AFP/ludovic MARIN)
Macron n’a « rien compris »
Les réactions politiques n’ont pas tardé à fuser : M. Macron « n’a rien compris » pour la tête de liste LFI Manon Aubry ; pas de « mesures concrètes » sur l’écologie pour EELV ; « des micro-mesures » pour Nicolas Dupont-Aignan, « impossible que le peuple français s’y retrouve ce soir » pour le porte-parole de LR Gilles Platret.
« Encore une fois Emmanuel Macron demande des efforts aux travailleurs, mais à aucun moment on ne demande d’efforts à ceux qui brassent des millions », a dénoncé le PS.
Côté « gilets jaunes », Maxime Nicolle a jugé que M. Macron n’avait « pas écouté ce qu’on dit dans la rue depuis cinq mois ». Pour Jérôme Rodriguez, « il vendrait du sable à un Berbère mais ça ne prend pas ».