
Vincent Chapuis gère l’île d’Ilur (Morbihan) et accueille les quelques touristes qui viennent visiter l’île. (©Actu Morbihan)
Cet été, actu.fr part à la découverte des métiers insolites, voire insoupçonnés ou presque disparus, de nos régions. 31e volet de notre série ce lundi 19 août 2019 avec le portrait d’un gardien d’île, dans le Morbihan.
Dans le golfe du Morbihan, derrière les populaires île aux Moines et Île d’Arz se niche l’île d’Ilur. Avec quelque 25 000 visiteurs en six mois, elle a conservé son caractère sauvage. Vincent Chapuis y travaille seul à l’année depuis dix ans.
Le gardien entretient les sentiers, les maisons, s’occupe des brebis, surveille les oiseaux, ramasse les déchets, assure l’accueil des quelques touristes… Avoir une île pour soi n’est pas de tout repos ! L’été, il y vit 5 jours sur 7, aidé par Gweneguan, un saisonnier.
« J’ai toujours aimé les grands espaces naturels. Mais je n’avais jamais eu un panel de travail aussi grand qui va du nettoyage des toilettes jusqu’aux demandes de subventions pour les travaux des maisons », décrit Vincent Chapuis.
Ici, j’ai appris l’apiculture du temps où il y avait des ruches. Mais aussi la mécanique, à conduire un tracteur…
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« Un lieu de partage »
L’île d’Ilur n’est pas accessible à pied mais reste publique. On ne peut y accéder qu’avec son propre bateau car il n’y a pas de navette. Les visiteurs sont donc « pour la plupart des habitués », constate Vincent entre deux poignées de mains aux plaisanciers qui le connaissent bien.
Ce sont des gens qui connaissent le lieu et qui le respecte. Ils viennent et reviennent parce qu’ils se sentent chez eux »

Devant un petit public, Vincent nourrit la trentaine de brebis. (©Actu Morbihan)
Le travail de Vincent y est pour beaucoup dans cette quête du confort des vacanciers. Il fait régulièrement des tournées pour assurer l’accueil, faire de la prévention et même parfois pour rendre des petits services. « C’est un lieu de rencontres et de partage ».
Ce sont souvent des propriétaires d’îles du Golfe qui viennent avec leur bateau. On échange sur notre façon de fonctionner car vivre sur une île c’est comme être sur une mini planète ».
L’histoire d’Ilur :
D’après les recherches historiques de Vincent et les témoignages qu’il recueille, six à sept familles de l’île vivaient essentiellement de l’agriculture et de la pêche à partir du 19e siècle.
L’île a ensuite été peu à peu désertée, avant qu’elle devienne intégralement privée dans les années 60. Cet achat a permis à son propriétaire de rénover les maisons, de planter quelques arbres exotiques et d’en diversifier le paysage.
Le conservatoire du littoral a ensuite racheté Ilur pour 2,6 millions d’euros en 2008, afin d’en faire « un lieu d’éducation » et a confié la mission de l’entretien au Parc Régional du Golfe du Morbihan en la personne de Vincent Chapuis.
Dans le petit village, on trouve également une chapelle où se recueillaient, et se recueillent toujours, les marins. Pour l’anecdote, on trouve aussi une tombe : l’épouse du propriétaire qui avait racheté l’île dans les années 60 pour lui en faire cadeau.

« L’histoire de ce lieu s’est transmise par le bouche à oreilles. Mais il n’y a jamais eu de véritable traces écrites », confie le gardien. (©Actu Morbihan)
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Sensibilisation à l’environnement
L’objectif de cet amoureux de la nature est de protéger l’île au maximum. La nuit, il effectue des rondes pour éviter que les campeurs s’installent. « Parfois il faut un peu hausser le ton. Mais c’est nécessaire pour que l’île soit bien conservée ».

Le ramassage des déchets fait partie de l’activité courante de Vincent : « ce ne sont pas des déchets laissés ici, mais des déchets ramenés par la mer ». (©Actu Morbihan)
Car si Ilur est ouverte au public c’est aussi pour sensibiliser à l’environnement. « Lorsque j’accueille des classes ou des groupes, je profite du site fragile pour évoquer le changement climatique. L’eau monte et on le constate ici. Bientôt, la pointe de l’île ne sera plus uniquement qu’une presqu’île ».
Ici tout est compliqué. Il n’y a pas de poubelle car je ne fais pas de ramassage de sacs par exemple. Donc cela demande plus de responsabilités. Ainsi on se rend compte de la difficulté et cela nous permet de se questionner sur ce dont on a réellement besoin. »
Dans un hangar, l’eau et l’électricité sont réunis pour expérimenter une nouvelle façon de vivre. Des panneaux solaires sont installés sur le toit pour alimenter Ilur. Le conservatoire à l’intention de mettre les maisons du petit village à disposition pour un gîte d’étape après 2020. Pour l’instant, elles servent pour des expositions.

Vincent a aussi l’occasion de parler de la faune et de la flore au public lors des rares visites guidées et de montrer des espèces parfois surprenantes qu’il trouve, comme ici un hippocampe. (©Actu Morbihan)
Une tournée nocturne devenue un rituel
Quand les visiteurs et les plaisanciers repartent, Vincent retourne dans sa maison au cœur de l’île. « Le soir, les brebis descendent dans le village quand il y a moins de monde, ça me fait de la visite ». Il profite alors du panorama magnifique que lui offre Ilur au coucher du soleil.
Son rituel à la nuit tombée ? « Je fais un dernier tour de toute l’île pour voir où sont les brebis et voir s’il n’y a pas de bivouacs. Je suis bien, c’est tranquille ».
Pratique :
Une dernière visite commentée de l’île d’Ilur est ouverte cette année :
RDV Samedi 22 septembre, 9h30 sur le port de Saint-Armel. Transport en bateau.
Visite commentée par Vincent Chapuis .
Tarif : 20 € adulte et 10 € enfant – de 18 ans.

Vincent Chapuis est le gardien de l’Île d’Ilur depuis qu’elle a été rachetée par le conservatoire du littoral, il y a dix ans. (©Actu Morbihan)