
Une fiat coupé, et coupée, transformée en friterie. Benetto Bufalino est à droite. (©Benedetto Bufalino)
Un bus-piscine, une voiture four à pizza ou friterie, une bétonnière boule à facettes… L’art de Benedetto Bufalino, 37 ans, ne supporte pas les musées. L’espace public est son aire de jeu. L’artiste sera au Louvre-Lens (Pas-de-Calais) les 24 et 25 août 2019 avec son bus piscine ; et à Lille (Nord) le 21 septembre 2019 avec une voiture friterie, toujours avec des œuvres déjantées qui font rêver.
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Objets détournés
Benedetto Bufalino est originaire de Lyon. Il vit à Paris depuis un an et demi. Diplômé de l’école des arts appliquées de Lyon en 2005, il choisit de « détourner des objets ».
Une voiture qui devient four ; une bétonnière boule à facette ; une caravane lampadaire ; une cabine téléphonique aquarium ou un panneau de signalisation skate board : il aime donner une fonction inversée aux objets, notamment aux véhicules. « Et si on se mettait à douter du monde dans lequel on vit ? » s’amuse-t-il à faire passer sans ces oeuvres.

Une bétonnière boule à facettes. (©Benedetto Bufalino)
Créer du lien social
Car l’artiste ne fait pas de l’art pour l’art. « je ne fais pas des oeuvres pour décorer les salons ». Son but : créer du lien social à partir de son art. C’est pourquoi il a choisi de ne pas « s’enfermer » dans les musées. « L’argent qu’on met dans les musées pour une certaine classe sociale, moi, je l’utilise à l’extérieur pour tout le monde ! »
Son terrain de jeu, c’est la rue. Une originalité qu’il explique par ses origines familiales.
L’artiste des gilets jaunes
Je ne viens pas d’une classe sociale aisée. Mes parents étaient ouvriers à l’usine, d’origine sicilienne. C’est grâce à l’école publique que j’ai réussi à percer dans le domaine artistique. Très peu d’artistes sont issus de la classe ouvrière. Il y en a peu qui font de l’art pour les gilets jaunes !

Une cabine de téléphone aquarium. (©Benedetto Bufalino)
Pour lui, « l’art contemporain n’est pas que incompréhensible, inaccessible. Le public auquel je m’adresse n’a pas les codes habituels de l’art contemporain. Sortir les oeuvres des musées permet d’aller à la rencontre de ce public. C’est un électrochoc visuel qui déboussole, pour permettre de réunir des inconnus dans un univers festif ».
Derrière le côté ludique de ses voitures ping pong ou piscine, il y a aussi une certaine démarche politique.
L’art contemporain doit être politique selon moi. Il doit bousculer le monde tel qu’il est pour le réinventer. Il est désobéissance civile dans un esprit festif. J’espère que mes oeuvres feront évoluer les mentalités.
Désacraliser les objets
Par exemple, en transformant une Fiat coupé en friterie, ou une limousine en banc public (en fait un R21 allongée), il veut « désacraliser les objets ». « Ce qui compte, c’est l’humain ». C’est pourquoi presque tous ces projets artistiques servent à réunir des gens autour d’événements festifs. Comme le bus piscine, ou la bétonnière boule à facettes qui sert dans des soirées DJ dans la rue !
L’artiste se sent porté par un but : « Une de mes missions est d’aider à ce que la France s’intéresse plus à la créativité qu’à la rentabilité… »
Benedetto Bufalino propose ainsi une nouvelle manière de voir l’espace public, pour que les habitants se le réapproprie : « Je veux rompre avec l’austérité des espaces publics ». On peut dire que c’est une réussite !
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Sa manière de travailler est donc loin de l’image d’Epinal d’un artiste solitaire dans un atelier isolé. « Mon atelier, c’est mon bureau, la ville et les espaces publics. Je me balade avec un carnet, je note et dessine les images insolites que je vois, une étrangeté sur un trottoir, des objets, un accident… »
Une collaboration à toutes les étapes
Puis, il s’entoure de collaborateurs qui l’aideront à créer l’œuvre. « Ce n’est pas un travail pyramidal. Je contacte ceux qui ont un savoir faire dans le domaine désiré. Chacun apporte ses compétences. C’est une collaboration dès la conception du projet ! »
Car Benedetto travaille toujours à partir d’une demande d’acteurs locaux, des mairies par exemple. Il n’aime pas le mot « commande », trop connecté commercial. « J’ai un fonctionnement particulier : je ne répond pas à une demande de bus-piscine par exemple. La structure me contacte pour créer un projet ensemble qui réunira les habitants. Je lui demande dans quel but elle veut organiser cet événement. On discute. Je propose des idées. On avance ensemble… »

Une Ford four à pizza (une « fourd »). (©Benedetto Bufalino)
Ce travail amène des projets fous, « qui semblent infaisables au départ. On s’unit pour les réaliser ». Une philosophie qui donne du sens à son art.
Sa phrase fétiche ? « Ils ne savaient pas que c’était impossible, alors ils l’ont fait » de Mark Twain. L’utopie est en marche avec Benedetto Bufalino !
L’artiste sera à Lens ce week-end, les 24 et 25 août 2019, auprès de son bus-piscine au Louvre-Lens ; et à Lille lors des Journées du Patrimoine le 21 septembre 2019 (quartier Faubourg de Béthune avec la Fiat coupé friterie). Infos : cliquer ici (site internet de l’artiste).

La voiture table de ping pong. (©Benedetto Bufalino)