
La messe de l’Assomption au sanctuaire de Rocamadour le 15 août 2018. © A. Décup
Rocamadour, village situé le long d’une énorme falaise, est l’un des lieux les plus renommés de France. C’est un sanctuaire où depuis huit cents ans les chrétiens viennent en pèlerinage. Un lieu étape retiré du monde, sur le chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle. Il y a dans notre pays, entre 100 et 1 000 sanctuaires, des petits, des grands, des mariaux, des témoins de la vie de saints. Certains attirent des foules du monde entier. C’est le cas de Rocamadour.
Depuis le XVIe siècle, le sanctuaire de la Vierge noire était perçu comme un lieu de piété où les populations quercynoises rurales venaient (au prix souvent de longues marches) se confier à Marie et l’implorer. Depuis une quinzaine d’années, face à l’évolution de la demande spirituelle, on assiste à une renaissance du pèlerinage pour une population jeune et urbaine.
Avec la dizaine des sanctuaires français les plus fréquentés, la cité mariale du Lot fait partie des pôles spirituels nationaux.
Sans les bénévoles, rien n’est possible
Ainsi, durant les mois d’été, prêtres, séminaristes et aidants viennent en nombre à Rocamadour et ne chôment pas.
Cette année encore le sanctuaire voit la fréquentation estivale des chrétiens augmenter. Lesquels viennent « pour réfléchir et se couper du monde » selon les mots de Cyprien, futur infirmier. Ils donnent par la même occasion, quelques jours de leurs vacances pour aider. Les habitués reviennent en nombre, d’autres se laissent tenter par l’expérience.
Tous ces bénévoles sont la colonne vertébrale du sanctuaire. Sans eux, rien ne serait possible pour entretenir, gérer, écouter, témoigner au milieu du flot des 500 000 visiteurs qui passent en juillet et août, à Rocamadour.
En ce début d’été, rencontre avec le père Florent Millet, recteur du sanctuaire, qui accueille depuis le début du mois, 200 jeunes, une quinzaine de prêtres et une trentaine de séminaristes.
Les jeunes viennent-ils de loin jusqu’à Rocamadour ?
Un jeune bénévole sur deux est un fidèle de Rocamadour. Enchanté, il revient pour la deuxième ou troisième fois. Presque tous viennent des grandes villes françaises et 80 % sont originaires de la région parisienne. Ils ont entre 18 et 30 ans. Les étrangers arrivent de toute l’Europe (beaucoup d’Espagne, d’Italie, d’Angleterre) mais aussi – et c’est nouveau -, d’Amérique du Sud. Cette diversité de formation et de culture fait la richesse du sanctuaire et nous mène nécessairement à l’universalité de l’Église.
Qu’attendent les nouveaux venus ?
Beaucoup de jeunes sont en questionnement par rapport à leur foi, à leur vie spirituelle, à l’Église. Les jeunes ont soif d’une dimension fraternelle.
Rocamadour est d’abord, pour eux un lieu de coupure et de détente, impliquant un temps de prière, une semaine de solidarité loin du stress du travail ou des études. Ils souhaitent créer des liens entre eux pour former des équipes pour travailler ensemble et créer (préparer des moments de réflexion ou des soirées festives). Souvent ils viennent en petits groupes entre amis.
Quelle est la spécificité de ce sanctuaire ?
Ce sanctuaire n’est pas étendu, il est condensé sur un espace restreint même si les trois niveaux (avec 60 mètres de dénivelé chacun) de la falaise demandent des efforts physiques constants. Les activités sont donc regroupées et les besoins variés. D’où la possibilité de changements de fonction pour le bénévole, ce qui enchante les jeunes : « Je fais tous les jours quelque chose de différent ».
Autre point fort : la fonction du sanctuaire n’est pas uniquement spirituelle comme à Lourdes par exemple. Ici, le jeune apprécie « le contact du quotidien ». Il peut être en relation permanente avec le visiteur qui ne croit pas en Dieu. Il sort du monde catho pour « aller à la périphérie » comme le demande le pape François. Ça aussi, c’est le souhait de nombreux jeunes.
« Nous souhaitons retrouver le lien avec les Lotois et les habitants de Rocamadour »
Quel air nouveau souhaitez-vous apporter au sanctuaire ?
Nous souhaitons retrouver le lien avec les Lotois et les habitants de Rocamadour en particulier.
Je tiens à dire à tous ceux qui sont présents toute l’année sur le site ou dans les environs : « Le sanctuaire a besoin de vous ! ». La communauté amadourienne, il ne faut pas l’oublier.
Et les Lotois non plus car ils font preuve d’une grande générosité à notre égard. Je reçois régulièrement de plusieurs villages du Quercy, une participation des récoltes d’agriculteurs (fruits, légumes ou viandes) ce qui aide bien le sanctuaire et ce qui fait le régal des bénévoles durant l’été.
Quel est le but du sanctuaire concernant l’accueil ?
Nous sommes dans un sanctuaire et l’objectif premier est l’évangélisation. Nous sommes là pour faire découvrir à travers la beauté du lieu, la présence de Marie qui est palpable par sa statue à la chapelle miraculeuse. Marie se met à notre portée. Et par Elle, nous essayons de montrer que Dieu dans un sanctuaire, se fait plus proche de nous que dans un lieu plus neutre.
Les équipes d’animation sont toutes au service de cette proximité avec le peuple de Dieu.
Rocamadour, c’est un trait d’union entre Dieu et les hommes. Le sanctuaire est là pour proposer et faciliter la rencontre Homme-Dieu. Si le lieu est vivant et habité, il manifeste davantage, la présence humaine et donc divine.
Y a-t-il des actions futures programmées pour un plus grand rayonnement du sanctuaire ?
Le diocèse souhaite qu’une congrégation religieuse puisse venir s’installer à Rocamadour.
Des religieux viennent déjà l’été, depuis deux ans en tant que bénévoles, dans l’optique de préparation et d’adaptation à ces fonctions. Après Mgr Norbert Turini, Mgr Laurent Camiade travaille en ce sens pour que cette réalisation devienne effective en 2020 ou 2021.
ANDRÉ DÉCUP